Thiéboudienne, sauce diaga

Un peu d’histoire : le thiéboudienne

« Prérogative essentiellement féminine, la préparation du « tieb » est donc un exercice de style. Une recherche permanente d’originalité et de saveurs. Qu’il s’agisse de l’ajout de crevettes dans le riz, de l’utilisation de mollusques ou de boulettes de poisson dans le bouillon, voire de tamarin dans la sauce, « chaque femme a son “femm”, son astuce pour ajouter du goût », explique la Sénégalaise Aïssatou Mbaye, créatrice du blog culinaire « AistouCuisine ».

Pour remonter aux origines du plat le plus emblématique du Sénégal, il faut remonter au siècle dernier. L’histoire naît dans le populaire quartier des pêcheurs de Guet Ndar, à Saint-Louis, alors capitale de l’Afrique occidentale française (AOF). Dans ce coin de la ville où, chaque jour, les pirogues débarquent le poisson pêché, une cuisinière s’est fait connaître pour son riz au poisson : Penda Mbaye (1904-1984). Selon les récits glanés par la commission de L’Histoire générale du Sénégal auprès des anciens et des descendants de Penda Mbaye, un gouverneur l’aurait approchée pour lui demander de cuisiner pour ses convives.

« Lors des cérémonies familiales ou officielles, il fallait contenter les invités par la quantité de nourriture, mais aussi par l’originalité du plat. Penda Mbaye a eu l’idée de colorer le riz, non pas avec le concentré de tomates que l’on trouve dans la plupart des tieb aujourd’hui, mais avec des tomates cerises, plus colorées et plus goûteuses. Le riz blanc est alors devenu le riz rouge », raconte Alioune Badiane.

Un premier élan de créativité qui en appelle d’autres, tandis que divers procédés sont alors expérimentés « dans le but de rendre le plat aussi beau que bon ». « Dans la version traditionnelle saint-louisienne, plutôt que de frire le poisson au démarrage comme cela peut se faire ailleurs, on le plonge lentement dans le bouillon, ce qui donne tout son goût au tieboudiène et offre une présentation plus jolie », explique Aïssatou Mbaye.

Traditionnellement présenté dans un large plat rond, le poisson disposé en son centre sur le riz, entouré de légumes, le tieboudiène « n’est pas un plat simple, voir grossier, comme certains peuvent le penser », poursuit Alioune Badiane. « Sa préparation est un art méticuleux, détaille-t-il, une préparation très codifiée dans laquelle chaque légume a un temps de cuisson spécifique et est ajouté puis enlevé à moment précis. Il faut que chaque ingrédient garde son intégrité physique et ait le meilleur goût et la meilleure texture possibles. C’est tout ce processus et toute cette créativité dans le choix des ingrédients qui font que le tieboudiène mérite son classement à l’Unesco. »

Technique, transmission et résilience

Le tieboudiène, c’est donc de la technique, mais aussi « de la transmission », insiste Aïssatou Mbaye. « La réussite du tiéboudiène ne tient pas au fait de suivre une recette à la lettre. De manière générale, la transmission orale est essentielle dans la cuisine sénégalaise, on apprend en observant la cuisinière et ses techniques afin de découvrir “la main de la cuisinière”, autrement dit ses petits secrets », s’enthousiasme-t-elle, expliquant qu’elle-même en tient la recette de sa mère, qui la tenait de sa mère, et ainsi de suite.

Si le fameux « riz au poisson », décliné à travers l’Afrique de l’Ouest et jusqu’en Afrique centrale sous différentes appellations (Djoloff Rice en Gambie, riz au gras au Mali), est avant tout une affaire d’héritage, il est aussi un symbole de l’histoire du peuple sénégalais et de sa résilience.

« Avant la colonisation, le riz n’était pas un ingrédient local, explique Abdoul Aziz Guissé, directeur du patrimoine au ministère de la Culture. À l’époque du colon, il a été imposé afin de faire passer le Sénégal dans une logique d’agriculture de rente. Les Sénégalais du Walo l’ont alors adopté en y introduisant tantôt du poisson, tantôt de la viande. C’est ainsi que, par résilience, un ingrédient imposé a mené à la création d’un plat national. »

« Une portée sociologique »

En plus d’être un exercice gastronomique « complexe et méticuleux », le tieboudiène « a une portée sociologique », renchérit Alioune Badiane. Roboratif et peu coûteux, il est traditionnellement le mets de la convivialité, consommé par les invités ou les membres d’une famille dans le même contenant, mais pas de n’importe quelle façon.

« Toute comme sa préparation, sa consommation est codifiée, relate Alioune Badiane. D’abord, il est recommandé de manger ce qui est devant soi, il est mal vu de grappiller la part du voisin. Mais par respect, tradition et courtoisie, vous verrez souvent la cuisinière pousser des morceaux de poisson ou de légume devant les personnes âgées ou les invités. »

Le classement au patrimoine immatériel de l’Unesco est donc une reconnaissance de tous ces codes et techniques. Pour Abdoul Aziz Guissé, il va également permettre « d’assurer la promotion de la gastronomie locale et de décomplexer ce savoir, souvent relégué au rang de “cuisine pauvre”, et constituer un argument pour le secteur du tourisme : quand on promeut la cuisine d’un pays, on promeut la destination ».

Préserver les ressources halieutiques

Une mise en avant qui attirera également l’attention sur certaines problématiques locales telles que la souveraineté alimentaire ou la préservation des ressources halieutiques. « Lors de nos échanges, des Saint-Louisiens ont fait valoir que certains poissons prisés dans la préparation du tieboudiène devenaient de plus en plus rares. Son inscription sur la liste de l’Unesco mettrait donc en lumière la question de la survie de la pêche artisanale, qui fait face à la surexploitation des eaux », faisait valoir le directeur du patrimoine, en décembre dernier. « Lorsque vous classez un bien, des mesures de sauvegarde sont toujours édictées. D’autant plus que cela engage le ministre de la Culture, donc le gouvernement », concluait-il.

Au-delà, l’inscription de ce plat emblématique au patrimoine immatériel de l’Unesco a une portée politique. Un geste bienvenu pour un pays encore très dépendant des importations alimentaires et où, craignant de voir leurs filets se vider, les pêcheurs artisanaux dénoncent la multiplication des accords d’exploitation des mers en faveur des étrangers. »

Source : https://www.jeuneafrique.com/1094533/societe/serie-le-tieboudiene-plat-de-resistance-et-de-resilience-1-5/

La recette provient de la chaîne Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=GcyQovcVtRE

Ingrédients, pour 2 personnes

  • 1 dorade grise
  • Brisures de riz pour 2 personnes

Légumes

  • 1 courgette
  • 1 patate douce
  • 2 piments végétariens

Le roff (la farce)

  • Quelques grains de poivre
  • Quelques piments oiseaux
  • 2 gousses d’ail
  • Persil
  • Sel

Le rossi

  • 1 oignon
  • 2 gousses d’ail
  • Huile neutre

Le nokoss (bouillon)

  • un oignon
  • 2 gousses d’ail
  • 1 cuillère à soupe de poivre noir
  • 1 cuillère à café de clous de girofle,
  • 4 piments oiseaux
  • 2 sardines ou une barquette d’anchois
  • du guedj ou 2 cuillères à soupe de sauce nuoc nam
  • sel

Sauce diaga

  • 1 filet de poisson de votre choix
  • du persil
  • de l’ail
  • sel et poivre
  • 1 cuillère à soupe de concentré de tomate
  • 5 tomates
  • 1 gros Oignon
  • 2 gousses d’Ail
  • Huile neutre

La recette

Le roff

Mixer tous les ingrédients du roff ou utiliser un mortier. Dans ce cas, il faudra d’abord pilonner les ingrédients secs puis ajouter les ingrédients qui vont rendre du jus ensuite. Le mélange doit être homogène.

Farcir le poisson avec le roff en pratiquant plusieurs incisions. Insérer le doigt dans la cavité pour créer de l’espace puis ajouter le roff dans la cavité ainsi créée. Saler le poisson.

Le nokoss

Mixer ou pilonner tous les ingrédients du nokoss jusqu’à obtenir une sorte de pâte.

Faire chauffer l’huile dans une grande casserole et saisir le poisson sur les 2 faces. Réserver

Couper grossièrement un oignon et 2 gousses d’ail. Les ajouter dans l’huile. Une fois qu’ils sont bien colorés, ajouter beaucoup d’eau. Ajouter les anchois ou les sardines.

Faire cuire les légumes que vous aurez choisi en commençant par ceux qui demandent la plus longue cuisson.

Quand les légumes sont bientôt cuits, remettre le poisson dans le bouillon.

Lorsque les légumes et le poisson sont cuits, les réserver dans un saladier.

Ajouter le guedj ou deux cuillères à soupe de nioc nam au bouillon.

Ajouter le nokoss dans le bouillon, puis le riz et remuer pour ne pas que les grains se collent entre eux. Couvrir et laisser cuire le temps nécessaire indiqué sur le paquet. Baisser le feu minimum et attendre 15 minutes, le couvercle reste sur la casserole.

La sauce diaga

Couper le filet de poisson pour pouvoir le piler plus facilement.

Piler 2 gousses d’ail, du persil, le poisson. Ajouter du sel et du poivre.

Badigeonner une assiette avec de l’huile neutre pour que les boulettes de poisson n’attachent pas.

Façonner de petites boulettes de poisson.

Faire chauffer une grande quantité d’huile dans une casserole. Une fois qu’elle est assez chaude, plonger les boulettes et les faire cuire quelques minutes.

Dans une casserole, ajouter de l’huile, un oignon et deux gousses d’ail émincés. Avant coloration, ajouter une cuillère à soupe de concentré de tomates et 5 tomates réduites en purée. Laisser cuire 5 minutes, puis ajouter un verre d’eau et assaisonner. Ajouter deux cuillères à café de vinaigre. Lorsque le mélange a une consistance de sauce, mettre les boulettes de poisson dans la casserole et laisser cuire pendant 4 à 5 minutes.

Dressage

Dresser le plat en mettant le riz, les légumes et le poisson accompagné de la sauce diaga.

Bon appétit !

15g de yet : mollusque séché (facultatif) 20g de guedj : poisson salé et séché (facultatif)

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